C’est au début de l’année 1963 que l’é ta t Egyptien
p rit la decision de faire reconstruire l’une des plus
belles pièces de l ’antiquité Egyptienne. Le temple de
la reine Hatchepsout se trouve su r la rive gauche du
Nil, sur les hauteurs de Luxor, à l’emplacement de
l’ancienne Thèbe, près de la chaîne des collines.
La direction de l’opération fu t laissée à l’auteur
de cet article étant à la fois architecte en chef du
Centre Polonais d ’Archéologie Méditerranéenne de
l’Université de Varsovie au Caire, dirigé par le Professeur
Kazimierz Michałowski avec la contribution
de spécialistes d’autres disciplines telles que l’archéologie,
l’égyptologie etc.
Portique face de la troisième terrasse
La reconstruction du portique face de la troisième
te rra s se était sans doute l’opération la plus urgente.
Quand à la fin du ΧΙΧ-e s. les fouilles mirent à jour
le temple, on ne trouva seulement que les vestiges du
portique. Pour que l’on en vienne à la reconstruction
de cette partie du monument il fallait attendre le déb
u t du XX s. Cette mission fu t confiée à l’architecte
frança is Baraize. Il e n tre p rit la construction des huit
piliers de front et d ’une représentation d ’Osiris. En
faisan t l’examen des emplacements, on s’aperçu toutefois
que Baraize plaça bon nombre de blocs à des en d
ro its dont les dits blocs n ’é taien t pas originaux. On
décida subséquemment au nom de l’authenticité re p ré sentée
par les trav au x de conservation, d ’ex tra ire une
p artie de ces blocs et de rem e ttre en chantier de m a niè
re à ce que la reconstruction des 16 pilliers n ’accentue
pas encore le défaut.
Les blocs utilisés par Baraize pour reconstruire les
piliers, ainsi que ceux que nous découvrîmes furent
utilisés à la reconstruction comme éléments existants —
tous ces blocs étaient très endommagés. Mais les
siècles n ’en étaient pas la raison unique — presque
3.500 ans — ces dégâts d a ta n t de l’antiquité étaient
l’oeuvre d ’une main consciente. Après la mort de la
reine Hatchepsout on fit disparaître toutes les traces
de son régne. Cent ans plus ta rd on effaçait de même
les représentations d’Amon. Ensuite Ramsés II recouvrait
les murs du temple de son nom. Et fin a le ment,
à l’époque chrétienne, les représentations des
divinités, fu ren t considérées comme celles de démons
maléfiques, et fu ren t martelées.
C’est ce précédent qui ren d it le trav a il beaucoup
plus malaisé su rto u t dans le cas de la reconstruction
des osiriaques.
A en juger par les traces un certain nombre d’osiriaques
fu re n t détachés des piliers mêmes; ensuite
brisés et se trouvaient dans des carrières avoisinantes,
tandis que certains fragments plus heureux sont au
Musée de l ’Art Egyptien au Caire, d ’autres enfin ont
été envoyés au Metropolitan Museum of Arts à New
York. Les fragments que nous découvrons ma intenant
sont déposés provisoirement dans le magasin constru
it à cet effet sur le te rra in de fouilles ju sq u ’au
moment de leur mise en (place. Au cours de la saison
des fouilles 1962—63 nous avons recollé les fragments
en obtenant 10 têtes et 3 torses.
Dans ces conditions le portique ne peut être r e construit
q u ’en partie, puisque l’on n ’a retro u v é qu’un
nombre incomplet de blocs originaux. De l’ensemble
des 192 blocs on ne put identifier que 89 et encore avec
des manques importants. De même en ce qui concerne
la reconstruction des architrave s: au début ils é ta ie n t
25, actuellement on ne peut reconstruire que 12 et
encore en fragments. L ’importance de la reco n stru ction
du portique est principalement la ferm etu re
spatiale de la vue sur l’extérieur de l’édifice. Le fro n ton
s ’orn e ra de quelques osiriaques dont les visages
sont relativement bien préservés. De p a rt et d ’au tre
des faces — les vestiges du nom de la reine. Des
deux côtés des piliers des lambeaux de l’inscription
perpendiculaire, couronnée d ’Horus représenté en
vautour.
La partie postérieure des piliers a moins souffert,
ce que l’on ne peut pas dire malheureusement de leur
partie supérieure, où se sont conservés intactes les
vautours aux ailes ouvertes dans la position de dieux
protecteurs.
Pareillement les architraves sur lesquels les in scriptions
avaient été martelées très précisément.
Le principe de base des trav a u x de reconstruction
est de ne pas toucher aux blocs originaux. La chose
la plus difficile est de les compléter. On fa it alors un
moulage en béton armé adhé rent à la base originale
de manière à ce que le ciment complémentaire
n ’adhère pas à la pierre et ne 1’ endommage pas. On
arrive à ce résultat en recouvrant la pierre originale
d’une toile de lin. Ensuite on plâ tre cette toile et l’on
comble les manques par du ciment.
Nos trav au x concernant la reconstruction des piliers
du fronton sont en voie de réalisation. Nous
avons utilisé jusqu’à maintenant 16 blocs originaux.
La reconstruction de certains blocs sera réalisée dans
un lapse de temps très court, suivant les plans détaillés
conçus pour chacun d’eux. Quant aux plus de
10.000 blocs re stan t sur le te rra in du temple on devra
les étudier conséquemment de manière à prép a re r les
possibilités d’une reconstruction complète.
La cour de la troisième terrasse
Au cours des deux premières campagnes de fouilles
en 1961—62 e t 1962—63 les trav au x avancèrent dans
les profondeurs de la troisième terrasse, là où le temple
adhère au rocher à la hauteur de 100 m. Ici se
trouve une cour presque entièrement ruinée et mesu
ran t 37 m sur 25 m.
Seul un portique à 8 colonnes se tro u v an t près
de l ’entrée du sanctuaire conserva sa forme architectonique.
Il ava it été construit plus tard, à la période
ptolémaïque, ce qui le différencie des autres parties
du temple. La chose la plus urgente fu t de le protéger
contre un effritement eventuel de la roche. Après des
examens interminables e t des essaies on a pu avoir
raison du danger, présenté par la roche menaçant de
s’effondre, à l ’aide d ’un plâtrage léger. C’est à ce
moment que l’on pu a rriv e r à un trav a il concret. On
a trouvé quelques blocs très précieux avec des reliefs
colorés en re tro u v an t sans aucune dificulté les endroits
dont ils provenaient. Ensuite le nettoyage de la
cour révéla quelque chose qui ju sq u ’à présent n ’avait
pas a ttiré l’attention des savants: Le pavement de la
cour fu t composé de blocs recouverts de reliefs colorés.
Un examen plus approfondi démontra les suppositions
émises au début, c’est à dire q u ’ici devait
se tro u v e r l’emplacement d’une salle qui fu t le th é â
tre d’une catastrophe et ceci encore 1000 ans avant
n o tre ère. Le nombre des colonnes, architraves et des
reliefs colorés donnent à penser qu ’il s’agissait ici
d ’une salle hypostyle.
Dans un proche fu tu r on réa lise ra le plan des emplacements
de cette salle. Et plus ta rd sans aucun doute
sa reconstruction partielle sera réalisée. A cet endroit
ju sq u ’a ma intenant on n ’a reconstruit que le portique
ptolémaïque se tro u v an t avant l’entrée du sanctuaire
d ’Amon.
La découverte d’un temple iconnu jusqu’à nos
jours
Entre le temple de Hatchepsout et le temple de
Mentouhotep II et III, au pied de la paroi rocheuse se
forma au cours des siècles un énorme éboulis. La
menace pesait surtout sur le sanctuaire de Tothmes I
relié à l’ensemble de Hatchepsout se tro u v an t au n o rd -
ouest, le plus proche de l’éboulis. On décida d ’e x tra ire
les débris du mur extérieur du sanctuaire et de
l’ab riter d’un toit provisoire. Le début des trav a u x ne
révéla rien d’intéressant. A la fin de mars 1962, on
finit par trouver des grands blocs de calcaire, une pile
de blocs de grés et finalement deux grandes figures
de calcaire blanc. Leurs inscriptions nous les firen t
identifier comme provenant de l’époque de Ramsès II.
Nous en avons informé l’inspecteur égyptien, le
Service des Antiquités et le Centre Polonais. Et chaque
jour de nouveaux blocs, fragments de colonnes,
d’architraves et de corniches furent m is .à jour...
Nous avions dû interrompre notre trav a il ju sq u ’à
la nouvelle campagne qui commença au mois d ’octobre
1962 et fu t terminée à la fin d’avril 1963. Nous découvrîmes
alors nombre de colonnes et une grande
partie d ’une terrasse du nouveau temple.
Il n ’y avait plus aucun doute qu ’un temple in connu
jusqu’alors fut découvert et qu’il n ’a jamais
été mentionné dans aucune publication.
Ce temple avait été construit à l’endroit le plus
haut de la vallée Deir el Bahari, entre le temple des
Mentouhoteps au Sud e t celui de Hatchepsout au
Nord. Autrefois une rampe longue de plus de 100 m
conduisait au temple à la h au teu r de 18 m. Seulement
la partie inférieure s’est préservée; elle é tait connue
au temps des fouilles de Naville mais personne ne
pouvait deviner à quoi servait-elle.
La partie découverte dernièrement c’est l’angle
droit du temple. Les blocs trouvés au début c’é ta it
le stylobate. Les lignes martelées indiquent l’épaisseur
du mur. A l’inté rieur du mur il y avait deux rangs
de colonnes au diamètres de 91 à 93 cm. La colonnade
de même que le mur tournait à l’angle droit. De nombreuses
colonnes se sont préservées jusqu’à 2 m de
hauteur, des autres seules les bases sont restées. Elles
étaient taillés en prismes 16-latérales, donc elles étaient
de type „proto-dorique”. Ensuite nous avons mis à
jour des bases encore plus grandes. Les deux types
de colonnes nous font supposer que nous avons
découvert une salle hypostyle.
Les murs du temple é ta ien t recouverts d ’un riche
relief coloré. Les fragments des blocs récupérés du
débris en témoignent. Nous avons été obligés de construire
un dépôt spécial pour emmagasiner, dresser
l’inventaire et étudier ce grand nombre de fragments.
La technique du relief est très différente des r e liefs
beaucoup plus précis du temple de Hatchepsout.
La technique des couleurs du nouveau temple est
cependant beaucoup plus précise et souligne chaque
détail. La fra îche r des couleurs est surprenante.
Le nom de Tothmès III de la XVIIIe dynastie figurent
sur de nombreux fragments des reliefs — p a r
conséquant la provenance de ce temple ne présente
aucun doute.
C’était une idée bien audacieuse que de placer
le temple entre deux autres, à l’endroit le plus h au t
de la vallée et d ’employer un module architectonique
plus grand que celui du temple plus ancien de H a tchepsout
et d’au tan t plus que celui du temple de Mentouhotep.
Les trois temples attachés à la roche escarpée
créent l’ensemble de Deir el Bahari aux valeurs spatiales
extrêmement intéressantes.
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